Le grincement de dents de Geneviève LeGal-Leblanc: Est-ce aux producteurs bios de payer pour se certifier? - Caribou

Le grincement de dents de Geneviève LeGal-Leblanc: Est-ce aux producteurs bios de payer pour se certifier?

Publié le

12 décembre 2016

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Geneviève LeGal-Leblanc est propriétaire, avec son conjoint Sean Butler, de Ferme et Forêt, à Wakefield, en Outaouais. Chez eux, les poules de races rustiques picorent dans un verdoyant pâturage à l'ombre des arbres à noix, des champignons shiitake poussent sur des billots de bois sous la canopée, le sirop d'érable est bouilli sur feu de bois et des aliments sauvages sont récoltés au champ et en forêt. Ces produits ont tout pour être considérés biologiques, mais les jeunes cueilleurs-agriculteurs ont choisi de ne pas aller de l’avant avec la certification. En fait, Geneviève déplore que ce soit à ceux qui produisent écologiquement qu’incombe le poids, en temps et en argent, de le prouver. Caribou lui tend le micro. Propos recueillis par Julie Aubé Photo de Jana Dybinski Pourquoi avoir décidé de ne pas aller de l’avant avec la certification biologique? Vivre d’une agriculture éthique et respectueuse de l’environnement, c’est ce qui nous a motivé à démarrer Ferme et Forêt. On voulait être certifié bio même si ça représentait des frais supplémentaires pour notre petite ferme en démarrage. Mais on ne s’imaginait pas que ça demandait autant d’énergie: c’est à nous qu’il incombait, par exemple, de prendre de notre temps pour contacter les anciens propriétaires pour démontrer l’historique de la terre, de faire plusieurs calculs, et c’est sans compter que pour les fermes diversifiées comme la nôtre, chaque production a son propre cahier de charge, multipliant la paperasse. Après les longues journées de travail à l’extérieur, toute cette administration supplémentaire nous a fait reculer. C’est aussi une question de principe: ça ne devrait pas être aux gens qui pratiquent une agriculture biologique de payer pour le démontrer. Si vous pouviez redessiner le système, que feriez-vous? Si on rêve en couleurs, j’aimerais que ce soit ceux qui décident d’utiliser les intrants chimiques qui aient le fardeau de la paperasse, de recevoir les vérificateurs et de l’indiquer aux consommateurs de façon transparente. Les gens veulent – et ont le droit! – de savoir ce qu’ils mangent. Le problème, c’est que l’utilisation des ces produits est devenue si répandue qu’on parle d’agriculture conventionnelle, ce qui sous-entend la normalité. C’est ridicule, considérant qu’ils sont tout nouveaux sur l’échelle du temps, et que l’agriculture biologique, ça marche et c’est rentable! Tant que l’agriculture dite conventionnelle rime avec intrants et que leur usage n’est pas indiqué de façon transparente, la certification bio est nécessaire dans le système agroalimentaire puisqu’elle est la seule façon d’informer les consommateurs qui n’ont pas de contact avec ceux qui produisent leurs aliments. La certification devrait toutefois minimalement être gratuite, et le processus très allégé pour les producteurs. Le ministère de l’Agriculture offre certains programmes, mais j’aimerais voir tous les ministères concernés (agriculture, environnement et santé) travailler ensemble pour financer la certification et soutenir davantage ceux qui souhaitent faire la transition. Un lien de confiance avec un producteur peut-il être une forme conviviale de certification? Absolument! Quand on veut se faire des nouveaux amis, c’est rare qu’on embauche des vérificateurs pour examiner les gens et valider qu’ils sont de bons amis potentiels! On va plutôt passer du temps avec eux, apprendre à les connaître, puis décider s’ils nous inspirent confiance. C’est dans cet esprit qu’on encourage les gens à venir nous rencontrer au marché de Wakefield ou à la ferme, à voir les productions, à poser des questions, à entendre les nuances. La conversation consommateur-producteur c’est précieux, ça peut démystifier bien des choses!
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