Dessine-moi une cuisine - Caribou

Dessine-moi une cuisine

Publié le

13 novembre 2018

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L’entreprise québécoise Jarre s’intéresse depuis quelques années au design d’objets fournissant des solutions au gaspillage alimentaire et propose une dizaine de créations, des modules de rangement aux objets d’art de la table, qui permettent une meilleure conservation des aliments. Pour ce faire, les deux fondatrices, Gabrielle Falardeau et Élyse Leclerc, réfléchissent sans cesse à ce que devrait être notre cuisine de demain… qui pourrait fortement, selon elles, s’inspirer du passé! Caribou a rencontré Gabrielle Falardeau. Texte de Véronique Leduc Photos fourmies par Jarre D’où vous est venue l’envie de créer une compagnie dédiée à la conservation des aliments? Élyse et moi travaillions dans le domaine de l’alimentation et nous constations qu’il y avait énormément de gâche alimentaire. L’idée est donc partie d’un besoin: celui de diminuer ce gaspillage. Élyse étudiait à ce moment les équipements de conservation et nous avons eu l’idée de retourner aux sources et de nous réapproprier des méthodes ancestrales qui fonctionnaient très bien autrefois. Par exemple, nos meubles Denise, conçus pour conserver les fruits et légumes, ont un design inspiré du Japon, avec des lignes fines. Mais la vérité, c’est que nous n’avons rien inventé: un tiroir à patates, ça existait avant, nous en avons simplement revu le design. Il y a une centaine d’années, nos ancêtres avaient une excellente idée des meilleures façons de conserver les aliments pendant longtemps. Quelles sont les lacunes de nos cuisines actuellement? Je dirais le fait que nous cachons beaucoup les aliments, ce qui fait que nous oublions ce que nous avons et que nous perdons beaucoup de nourriture. Je crois aussi que nous n’avons pas une bonne façon de ranger nos aliments. [gallery type="rectangular" link="file" size="large" ids="5702,5703"] Quelle serait donc pour vous la cuisine idéale? Aujourd’hui, nous avons des cuisines à aire ouverte, nous sommes beaucoup plus transparents par rapport aux ingrédients utilisés et à leur provenance. Pourquoi ne pas appliquer cette idée de transparence lorsque vient le temps de ranger nos aliments? Nous gagnerions aussi à mieux penser nos cuisines pour les adapter à nos besoins précis. Par exemple, en Europe, les cuisines sont bien plus petites, mais on y a une bien meilleure façon de ranger les aliments et les instruments. Aussi, je pense que nous investissons tellement d’argent dans nos cuisines, que nous devrions pouvoir les déménager avec nous. Il faudrait pouvoir repartir avec ses ilots, ses meubles de cuisine, son rangement et continuer à les améliorer selon nos besoins au fil des ans. Quels pays pourraient nous servir d’exemple? Beaucoup de recherches sont faites en Europe sur la cuisine circulaire. Par exemple, quand on y fait chauffer quelque chose, la chaleur peut être réutilisée pour allumer une lumière. En Europe, en Allemagne par exemple, ou dans les pays scandinaves, beaucoup de produits sont testés mais est-ce que ça va se rendre ici? En Amérique, nous avons tellement de place que nous ne savons plus quoi en faire alors nous construisons des armoires gigantesques qui font que nous pouvons acheter trois fois de la farine sans savoir que nous en avons déjà.
Soyons plus intelligents: chaque chose devrait avoir sa place, sans espace perdu et sans espace en trop.
En ce moment IKEA, avec son concept IKEA 2025, réfléchit à la cuisine du futur. Ce qui ressort, c’est que chaque aliment, chaque objet devrait avoir bientôt sa place bien à lui dans la cuisine. Ici, à votre connaissance, est-ce qu'il y a des designers ou des chercheurs qui font des recherches liées à l’amélioration de nos cuisines? Au Québec, à chaque année, dans les universités, il y a des projets de recherche liés à la cuisine et à ses équipements. Mais la recherche et le développement, ça coûte tellement cher et c’est difficile d’obtenir des subventions... Remarquez-vous un intérêt ou une ouverture des Québécois pour ce qui est des changements d'équipements en cuisine? Les Québécois sont moins prêts à voir la cuisine autrement si on compare aux gens de certains pays, et ne voient pas encore le besoin de changer. D’ailleurs, quand on a fait notre campagne de financement pour les meubles Denise, beaucoup de réponses venaient de la France. Quelques Québécois prennent des actions face à la gâche alimentaire et posent de petits gestes, mais sont-ils prêts à faire d’importantes modifications en terme d’équipements et d’habitudes? Je ne crois pas. Ce sont de gros changements à instaurer dans une famille et habituellement, nous pensons au moment présent plutôt qu’à l’investissement à long terme… À mon avis, ça peut prendre un siècle dans une société avant que des changements majeurs prennent leur place. Je prends un exemple qu’Élyse et moi avons étudié; celui du réfrigérateur. Avant les années 1950, les gens n’avaient pas de réfrigérateur et à un moment, tout le monde s’est mis à s’en procurer un. Aujourd’hui, presque 100 ans plus tard, c’est impensable pour les gens de vivre sans. Et donc, peut-être que ça va prendre un autre siècle avant d’arriver à des habitudes moins énergivores dans nos cuisines. Qu’avez-vous envie de laisser comme message aux Québécois? De ne pas avoir peur d’essayer des nouvelles choses, et ce, autant lors de la préparation des repas que dans le choix de design de leur cuisine. La cuisine, c’est un laboratoire! La vie passe vite, alors osons essayer!
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