Jean Morin de la Fromagerie du Presbytère Nos fromages fins n’ont rien à envier à ceux qui sont fabriqués outre-Atlantique. Pour le prouver, le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation organise depuis plus de 20 ans le concours Sélection Caseus, qui met en lumière l’excellence de nos fromagers. Rencontre avec quatre lauréats de cette année.
Article présenté par le MAPAQ
JEAN MORIN
CASEUS OR: LA RELIGIEUSE, FROMAGERIE DU PRESBYTÈRE
CASEUS BRONZE: LE PIONNIER, FROMAGERIE DU PRESBYTÈRE ET FROMAGERIE NOUVELLE-FRANCE
Des fromages en héritage
Quelques jours après avoir remporté le Caseus Or pour La Religieuse en 2019, Jean Morin s’envolait pour la Suisse, où son fromage à raclette était en vedette dans une dégustation. Le succès de La Religieuse n’a rien d’étonnant: avec sa saveur douce, c’est un produit qui convient à tous les palais. En outre, il est polyvalent. «Il se prête bien à la dégustation en plateau comme à la préparation de plats gratinés», décrit le fromager, pas peu fier des exploits d’un de ses bébés.
La famille d’abord
À l’origine de ce succès, il y a une ferme laitière familiale de Sainte-Élizabeth-de-Warwick où se sont succédé plusieurs générations de Morin. Aujourd’hui, la ferme
Louis d’or fournit le lait qui, dans l’ancien presbytère situé juste en face, sert à la production des fromages. Depuis quelques années, Jean Morin a confié la ferme à ses enfants pour mieux se consacrer à la fromagerie. Et la relève se dessine déjà, puisque le clan compte désormais trois petits enfants… qui ne s’intéressent toutefois pas encore à la fabrication du fromage: «Ils préfèrent courir après les tracteurs!» explique en riant leur grand-père.
La fromagerie qui rassemble
Les vendredis d’été, la fromagerie accueille sa famille élargie: des centaines d’épicuriens qui viennent déguster son fromage en grains encore tout chaud sur le parterre du presbytère.
Chaque année, le jury du concours Sélection Caseus, composé d’experts représentant les diverses filières du secteur fromager, évalue des centaines de fromages exclusivement québécois. Les lauréats sont choisis en fonction de leur apparence, de leur odeur, de leur texture, de leur flaveur et de leur saveur.
SIMON HAMEL
CASEUS ARGENT: LA TOMMETTE, L’ATELIER FROMAGERIE
Seul aux commandes
Difficile de trouver une production plus artisanale que celle de Simon Hamel. Mais même s’il ne compte pas encore sur des employés pour l’appuyer dans son travail – c’est en solo qu’il prend soin chaque jour de ses fromages de chèvre –, il arrive à se glisser parmi les meilleurs fromagers de la Belle Province. En 2019, sa Tommette à la texture onctueuse et aux arômes caprins marqués a ainsi remporté le Caseus Argent. «Je suis encore seul dans mon atelier, mais j’augmente la production petit à petit», souligne-t-il.
Recette gagnante
Quand on lui demande comment reconnaître un bon fromage de chèvre, Simon Hamel répond que c’est une question d’équilibre. «Quand on a réussi à éviter tout goût “agressant”, en développant un bel équilibre entre l’acide, le salé et le sucré, on a un beau produit. Ensuite, le défi, c’est de reproduire la même chose chaque fois.» Selon lui, l’art fromager demande du temps. «Faire du bon fromage, c’est aussi s’en occuper tous les jours.»
MARIE-CHANTAL HOUDE
CASEUS BRONZE: LE PIONNIER, FROMAGERIE NOUVELLE-FRANCE ET FROMAGERIE DU PRESBYTÈRE
CASEUS LONGÆVI: LE ZACHARIE CLOUTIER, FROMAGERIE NOUVELLE-FRANCE
La passion du fromage…et des brebis!
Marie-Chantal Houde l’admet d’emblée: «Le métier de fromagère est demandant. Pour réussir, il faut non seulement aimer le fromage, mais aussi être passionnée. D’ailleurs, toute entreprise où on prend soin d’animaux demande un certain don de soi.» Dans le cas de la Fromagerie Nouvelle-France, les brebis destinées à la production de lait sont traitées aux petits oignons, parce que c’est à partir de bon lait qu’on réalise de bons fromages, croit Mme Houde.
Rigueur, rigueur
Non seulement le troupeau de quelque 250 brebis est-il nourri exclusivement au foin sec, mais la fromagère établie dans les Cantons- de-l’Est suit un cahier de charges «assez rigoureux» pour produire son lait dans les règles de l’art. «Nous utilisons les mêmes normes que les producteurs de lait de vache, précise-t-elle. C’est grâce à cette rigueur que nous avons gagné autant de prix.» Cette année, elle a ramené trois Caseus à la maison, dont le bronze pour Le Pionnier, qui amalgame le lait de vache et celui de brebis, et le Longævi pour le Zacharie Cloutier.
SIMON-PIERRE BOLDUC
MENTIONS SPÉCIALES: LE CHEMIN HATLEY ET L’ALFRED LE FERMIER, FROMAGERIE LA STATION
Choisir le bio
En 1928, Alfred et Aglaé s’installaient sur le chemin Hatley, à Compton, près de Sherbrooke. Quelque 90 ans plus tard, leurs descendants – Pierre Bolduc, Carole Routhier et leurs fils Martin, Vincent et plus particulièrement Simon- Pierre, le fromager – remportaient non pas une, mais bien deux mentions spéciales pour leurs fromages Chemin Hatley et Alfred le Fermier.
Tradition fermière
À la ferme, le virage vers le biologique s’est amorcé dès 1995, bien avant que ce type d’agriculture ne devienne tendance. Les 400 acres de terre de la ferme aujourd’hui consacrées au bio sont même partiellement visibles de la route: si vous passez par là, vous verrez peut-être quelques-unes des 85 vaches laitières de la famille y paître en toute liberté. «Elles sont le cœur de notre production fromagère», indiquent les propriétaires en précisant, pour la petite histoire, qu’une seule vache donne l’équivalent de 130 meules d’Alfred le Fermier, nommé bien sûr en hommage à leur aïeul.