Christian Barthomeuf en 3 idées - Caribou

Christian Barthomeuf en 3 idées

Publié le

10 août 2020

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Christian Barthomeuf n'est pas un paysan comme les autres. Christian Barthomeuf est un pionnier, un rebelle qui a suivi sa propre voie, envers et contre tous. Il se raconte dans son Autoportrait d'un paysan rebelle qui paraît ces jours-ci aux Éditions du passage.

Texte d'Audrey Lavoie

Débarqué au Québec il y a bientôt 50 ans, ce Français d'origine a beaucoup fait pour la viticulture québécoise. Il a été le premier à planter, en 1980, un vignoble commercial à Dunham dans les Cantons-de-l'Est: le Domaine des Côtes d'Ardoise. Ce vignoble, qui l'a fait passé pour «l'idiot du village», est passé aujourd'hui à d'autres mains, mais est toujours en activité dans cette ville devenue la capitale de la vigne au Québec.

Puis en 1989, le vigneron a été le premier de la province à faire du vin de glace. Ensuite, il s'est attaqué aux pommes et a inventé un alcool devenu emblématique de notre terroir et de notre nordicité: le cidre de glace. 

Depuis 2002, il pratique, avec sa complice Louise Dupuis, la culture fondamentale sur sa terre de Frelishburg où les pommiers vivent en autonomie – ou presque – aux côtés de leurs 20 poules et de milliers d'insectes. Sur cette terre sont produits des cidres fermiers, des cidres de glaces et un vin de paille, tous biologiques.

Ce n'est pas pour rien, qu'après tout ça, Christian Bathomeuf a voulu, bien humblement, se raconter. Et c'est ainsi que Autoportrait d'un paysan rebelle était né. L'homme y parle du chemin parcouru, des son enfance dans la campagne française jusqu'aux terres des Cantons-de-l'Est, en passant par Toulouse, la forêt amazonienne et l’Asie.

Après la lecture de son livre et une conversation téléphonique avec cet homme inspirant, voici les trois idées qui me sont restées à l’esprit.

Les hasards de la vie

Dans cet autoportrait, Christian Barthomeuf raconte sa vie, certes, mais il  explique comment les différents métiers (photographe, éleveur d’oies, vigneron, etc.) qu’il a exercés et les différentes rencontres qu’il a faites l’ont mené où il est aujourd’hui. Sans plan précis, il s’est laissé guider par les différents hasards de la vie.

«[Je suis ici aujourd’hui] parce que mon père m’a offert un appareil photo pour mes 11 ans. C'est la photo qui a déclenché tout [ce qui s'est passé par la suite]. Aujourd'hui, [si j'avais eu un cadeau différent], je pourrais aussi bien être chômeur à Zanzibar.»

«Je faisais du vin de glace en 1989 et je me suis dit: "Pourquoi je n’essaierais pas avec de la pomme?" Mon voisin avait des pommes. S’il avait eu des bananes, j’aurais essayé avec des bananes!»

«Je voulais surtout montrer qu'on n'a pas besoin de faire 15 ans d'école pour faire des choses intéressantes; qu'un autodidacte peut faire à peu près ce qu'il veut. J'ai fait 36 métiers, qui m'ont tous appris quelque chose.»

Un des pommiers du domaine, dans son écosystème. | Photo de Christian Barthomeuf

La culture fondamentale

Après avoir commencé par pratiquer l’agriculture conventionnelle, il est passé à la culture biologique. Depuis 15 ans, il a poussé la chose encore plus loin et pratique aujourd’hui ce qu’il a nommé la culture fondamentale.

«La culture fondamentale, c’est une copie conforme de la nature. Quand on a un problème, on se demande comment la nature le règle. C'est tout. Le but, c'est de ne pas intervenir.»

«Je n'ai rien inventé du tout, la nature l'a fait avant moi, d'autres peuples l'ont fait aussi, mais sans la nommer.»

«Dans la forêt, on ne met pas de compost ou de fumier. [La nature se charge de tout.] Ici, on remplace le fumier naturel de la forêt (excréments d'animaux, végétaux en décomposition, etc.) par 20 poules pendant 3 mois. Elles vont faire caca par ci par là et disperser les semences. Elles sont partie prenante de la culture fondamentale. Et elles me donnent de bons oeufs frais tous les jours!» 

Les travailleuses du vergers | Photo de Christian Bathomeuf

L'importance des insectes

Dans la culture fondamentale, les insectes jouent un rôle… fondamental! Ils sont essentiels à l'équilibre de tous les écosystèmes, comme dans celui du Clos Saragnat.

«Ce n'est pas l'homme qui gère la nature, ni les produits chimiques; ce sont les insectes. Enlevez tous les insectes d'une forêt et elle va dépérir. Le problème, c'est que lorsqu'il y a un insecte dans un verger ou dans un vignoble, on sort l'artillerie lourde et il est immédiatement éliminé.»

«Dans le sud du Québec, on a environ 30 000 espèces d'insectes. Ça m'a pris environ 12 ans pour que toutes se réinstallent [sur ma terre] et reprennent possession des lieux. Et on pourrait les anéantir en une demie-heure. C'est ça qui est abrutissant.»

«J'ai demandé un jour à un entomologiste comment je pouvais savoir si tous les insectes [nécessaires dans un écosystème qui fonctionne] étaient présents. Il m'a répondu: "Quand vous ne les voyez plus". Je ne comprenais pas sur le coup, mais là j'ai compris. Une fois qu'on ne les voit plus, c'est que l'équilibre est rétabli. Chacun est occupé à faire ce qu'il doit faire; la nature fait bien son job.»

Autoportrait d’un paysan rebelle
Les éditions du passage

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