Joon: des effluves du Caucase malgré la pandémie - Caribou

Joon: des effluves du Caucase malgré la pandémie

Publié le

12 décembre 2020

Caucase chez Joon
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Après des années à travailler dans les cuisines de restaurants ici et ailleurs, lorsqu’est venu le temps de lancer son projet à elle, la cheffe Erin Mahoney a voulu offrir quelque chose qui allait se démarquer dans le paysage de la restauration montréalaise. Voilà comment est né Joon en pleine pandémie, apportant des effluves du Caucase dans la Petite Italie.

Texte de Véronique Leduc
Photos de Fabrice Gaëtan

Il est 16h un jeudi d’automne. Boulevard Saint-Laurent, la nouvelle salle à manger du Joon est vide, mais dans la cuisine, à l’arrière du restaurant, il y a beaucoup d’action. En effet, depuis le début d’octobre, les plats prêts à manger inspirés de l’Arménie, de l’Iran et de la Géorgie que propose Erin Mahoney sont très demandés.

Justement, la cheffe des lieux termine une cuisson et s’assure auprès de ses cuisiniers que tout va bien avant de venir s’installer au long comptoir qui fait face à la cuisine ouverte. Le Joon devait exister dès le printemps dernier, mais son ouverture, à cause des circonstances, a été retardée. «Après des délais pour la rénovation du local, nous avons finalement ouvert le 26 septembre… au moment où le gouvernement annonçait que les salles à manger devaient fermer de nouveau le 1er octobre», explique la femme de 40 ans qui porte un t-shirt bleu sur lequel le nom de son restaurant est inscrit en lettres attachées.

Une cuisine réconfortante

Erin est née à Montréal et a des racines irlandaises et italiennes… contrairement à ce que pourrait laisser croire sa cuisine. Son amour pour les plats du Caucase lui vient plutôt de l’enfance, étant donné qu’elle a grandi dans Notre-Dame-de-Grâce, où plusieurs immigrants de ce coin du monde se sont installés. «Dès mon jeune âge, on allait en famille dans des épiceries et des restaurants iraniens. Pour moi, le contact avec cette nourriture était normal. Je me souviens même que, quand j’ai eu ma première paye, j’ai sorti ma mère dans un resto iranien», raconte Erin. Et quand on dit que la nourriture de notre enfance est celle qui nous touche le plus, elle en est la preuve. «C’est une cuisine que je trouve extrêmement réconfortante et pour laquelle j’ai souvent des envies irrépressibles.»

La découverte s’est continuée auprès de son amoureux des 13 dernières années, aussi partenaire dans l’aventure du Joon, Ilya Daftari, né en Iran, arrivé au Québec alors qu’il était enfant. Puis, Erin a poursuivi sa connaissance des spécialités de cette région de l’Asie de l’Ouest grâce à des voyages et à des stages. «C’est une cuisine parfumée aux saveurs variées, mais très accessible pour les gens d’ici», assure la sympathique cheffe avant de parler avec amour des pains, des fromages et des braisés de viandes et de fruits que l’on savoure dans ces pays.

C’est justement toute la richesse de cette cuisine méconnue des Québécois que celle qui a œuvré pendant plusieurs années au Saint-Urbain et à la Bête à pain à Montréal veut faire connaître. «Je voulais me différencier des autres restos perses, qui sont peut-être intimidants pour les gens qui ne s’y connaissent pas. Je veux que tout le monde soit à l’aise de venir ici.»

Pains plats, trempette aux betteraves, feta maison, soupe traditionnelle iranienne, lentilles braisées, koofteh d’agneau et de veau farci de fruits séchés, cuisse de canard braisée avec sauce à la pomme grenade… voilà le genre de mets que peuvent présentement découvrir ceux qui commandent des plats prêts à manger au Joon, qui adaptera son menu selon les saisons.

«C’est ce qu’on fait en Arménie, en Iran ou en Géorgie: on suit les arrivages. Je voulais le faire aussi et m’adapter en cuisinant avec des ingrédients du Québec des plats de là-bas.»

Erin achète son safran et quelques épices directement d’Iran, mais privilégie pour le reste les ingrédients d’ici, qu’elle rêve un jour de faire pousser dans une ferme près de la ville.

La carte du Joon est complétée par des vins nature grecs, géorgiens, italiens et slovènes, qu’Erin a choisis avec soin.

En attendant la réouverture

Bien sûr, la cheffe montréalaise a hâte de pouvoir recevoir des clients, mais, positive, elle voit un bon côté à la situation actuelle. «C’est moi qui reçois les commandes et qui donne leurs plats aux clients. Je prends le temps de leur parler et de développer un lien, ce que j’aurais moins le temps de faire normalement», explique la cheffe du Joon, un mot en vieux farsi qui signifie «vie» et «esprit», mais qui exprime aussi de la tendresse quand on l’appose à côté du prénom d’un proche. Un nom à l’image de l’affection que porte Erin à cette cuisine.

Pensive, elle ajoute: «C’est fou parce que, quand tu veux ouvrir un resto, tu travailles pendant des années, tu réfléchis à chaque aspect afin que tout soit parfait et, finalement, en quelques jours, une situation hors de ton contrôle fait que tu dois te revirer de bord et tout changer: trouver des contenants pour emporter, revoir ton menu, organiser les tâches différemment…» Mais le jeu en aura valu la chandelle puisque, depuis quelques semaines, les gens viennent de partout à Montréal, mais aussi des alentours pour goûter les plats d’Erin, lui prouvant que la demande et la curiosité qu’elle avait imaginées pour cette cuisine étaient bien réelles.

La Caucase dans la cuisine

Erin Mahoney propose de faire à la maison cette trempette simple nommée Maast o khiar pour un aperçu de la cuisine du Caucase.

Ingrédients
1 pot (750 ml) de yogourt grec 10 %
2 tasses de concombre libanais + 2 c. à soupe en garniture
2 c. à thé de menthe séchée + 2 c. à thé en garniture
¼ tasse de raisins secs dorés coupés en petits morceaux + 1 c. à soupe en garniture
⅓ tasse de noix de Grenoble hachées finement
2 ¼ c. à thé de sel de mer
⅛ c. à thé de poivre fraîchement moulu

Préparation
Laisser le yogourt s’égoutter dans un sac à yogourt ou une étamine de 1 à 3 heures afin d’obtenir environ 500 g d’un yogourt épais et crémeux. Mettre le yogourt dans un bol et ajouter le sel, le poivre, la menthe et les raisins coupés. Ajouter les concombres en dés et mélanger. Garnir avec les noix de Grenoble, la menthe et le concombre. Servir avec du pain iranien ou des pitas réchauffés.

Chaque semaine, Caribou fait découvrir dans les pages du quotidien Le Devoir, un homme ou une femme, qui, à sa façon, nourrit le Québec.

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