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Une cabane à sucre écolo-végane

Publié le

08 avril 2023

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En offrant une version ultralocale et végétalienne du monument de la culture culinaire québécoise qu’est la cabane à sucre, la Cabane à Tuque, à Mont-Tremblant, prouve que les traditions ne sont pas immuables et peuvent s’enrichir de nouvelles approches.

Texte de Benoit Valois-Nadeau

La Cabane à Tuque est née de la volonté de Simon Meloche Goulet, maraîcher qui se fait acériculteur et restaurateur quelques mois par année. Écologiste convaincu, il souhaitait «partager [son] mode de vie» autour d’une activité rassembleuse.

«Je suis végétarien depuis l’adolescence, j’essaie d’être zéro déchet, de manger le plus localement possible. Mon menu reflète tout ça. Le côté végane de l’entreprise ressort, mais ce dont je suis le plus fier, c’est qu’il n’y a aucun ingrédient qui provient de l’épicerie, à part le sel et le millet. À travers mon menu, c’est ma petite communauté que je fais découvrir.»

Sur sa table, les légumes servis viennent de sa ferme, les épices boréales, les champignons et, évidemment, le sirop d’érable sont récoltés dans la forêt des alentours. Les indispensables pommes de terre font un peu plus de chemin: elles poussent sur la terre d’une amie, à huit gros kilomètres de là. Pour les aliments qui viennent d’un peu plus loin, comme le miso, produit en Estrie, Simon rappelle le chemin qu’ils ont franchi en inscrivant le nombre de kilomètres parcourus à même le menu. Une façon pour le sympathique trentenaire de prouver que véganisme peut aussi rimer avec locavorisme.

«C’est une fierté pour moi de montrer que c’est possible de manger [sainement et localement]. Il y a une fausse croyance qui veut que le véganisme local ne puisse pas exister au Québec. C’est faux, on peut trouver [dans les aliments locaux] tout ce dont on a besoin», soutient Simon Meloche Goulet.

«Au-delà du véganisme, je suis pour le locavorisme, ajoute-t-il. C’est plus sensé de manger ce qui vient de ma cour que d’avoir une diète californienne avec des avocats qui poussent à des milliers de kilomètres dans des conditions qu’on ne connaît pas. Plus on se rapproche de l’aliment, plus on voit l’effort derrière et plus on le traite avec respect.»

Des goûts nouveaux

Les familiers du temps des sucres ne seront donc pas désorientés puisque le menu de la Cabane à Tuque en suit les grandes lignes, avec de sympathiques clins d’œil à la tradition: soupe aux pois, cretons (végétaliens), pommes de terre rissolées, fèves au «pas de lard» (le lard est remplacé par des légumes déshydratés et des oignons), tourtières (au millet) et crêpes de sarrasin.

«Plus on se rapproche de l’aliment, plus on voit l’effort derrière et plus on le traite avec respect»

Simon Meloche Goulet

Les oreilles de crisse sont devenues des oreilles de Bouddha (des morceaux de courge butternut déshydratés), les œufs sont remplacés par du «temp’œuf», un tempeh fait maison aux pois jaunes, et le pouding chômeur est relevé d’amazake, un yogourt végétal. L’auteur de ces lignes peut confirmer que cette formule sans viande est fort réussie et procure autant de satisfaction qu’un menu traditionnel.

«En général, les gens qui arrivent avec une certaine curiosité repartent avec de nouvelles connaissances sur plein de nouveaux produits et des saveurs différentes, explique l’acériculteur. Mais beaucoup [de goûts] sont très similaires.»

Le succès de la Cabane à Tuque, qui en sera cette année à une septième saison des sucres, prouve qu’il existe bien une demande pour une option de rechange au repas traditionnel. Dès l’ouverture, en 2016, l’expérience a été couronnée de succès.

«Nous sommes devenus rapidement populaires, parce qu’il n’y avait pas d’options pour les végétariens lors du temps des sucres», explique l’entrepreneur, qui souligne que sa clientèle comprend aussi beaucoup d’omnivores.

Gardien de la tradition

Le souci écologique de la Cabane à Tuque ne s’arrête pas à la nourriture servie. Sur place, le seul plastique se trouve dans les plats que les clients sont invités à utiliser pour rapporter leurs restes et éviter le gaspillage. L’eau d’érable est récoltée non pas avec des tuyaux, mais à l’ancienne, une chaudière à la fois, par les clients ou des amis. L’eau est ensuite bouillie grâce à un feu alimenté au bois.

«On est probablement dans les dernières cabanes à sucre à utiliser la méthode traditionnelle, tant dans la récolte que dans la production de sirop», estime Simon Meloche Goulet.

Paradoxalement, la Cabane à Tuque se rapproche donc beaucoup des cabanes à sucre de «l’ancien temps»!

Le concept d’entreprise familiale est aussi poussé à un niveau supérieur puisque les clients sont accueillis dans la maison de Simon, qu’il partage avec sa conjointe et ses deux petites filles, souvent présentes lors des réceptions. Une maison accueillante et chaleureuse qu’il a bâtie selon des principes de construction écologique, capable de recevoir de petits groupes de 20 à 40 personnes.

Comme quoi les traditions ne meurent pas en se transformant, mais se bonifient.

La Cabane à Tuque, 370, montée Fortier, Mont-Tremblant. Sur réservation seulement. lacabaneatuque.com

Autres options végés

De plus en plus d’acériculteurs offrent à la clientèle des options pour se sucrer le bec sans viande.

  • La Cabane à pommes propose des versions végétariennes ou végétaliennes de ses repas gourmands mettant en valeur le terroir québécois (405, rang de l’Annonciation, Oka).
  • Le Palais sucré a aussi élaboré un menu sans viande, qui met notamment en vedette un tofu à l’érable (864, rang Chartier, Mont-Saint-Grégoire).
  • Près de Québec, la Cité agricole, une ferme agrotouristique, a un menu végé qui valorise les cultures de l’endroit (4260, chemin Notre-Dame, Saint-Augustin-de-Desmaures).
  • Près de Montmagny, le Bistreau d’érable est certifié biologique par Ecocert Canada et offre un menu végétarien élaboré qui fait la part belle aux producteurs indépendants de ChaudièreAppalaches (51, 6e Rang Ouest, Sainte-Lucie-de-Beauregard).
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