Il est plutôt rare de croiser un citoyen japonais dans un petit village côtier de la Gaspésie, de la Côte-Nord ou des Îles-de-la-Madeleine. Mais pas à Sainte-Thérèse-de-Gaspé, dans la MRC du Rocher-Percé, où se trouve la plus grosse usine de transformation de crabe des neiges de la province.
Là, depuis des décennies, des acheteurs japonais viennent chaque année inspecter de visu les cargaisons de crabes des neiges qu’ils achètent de l’entreprise E. Gagnon & Fils. «Ça fait presque 30 ans qu’on fait affaire avec le Japon, c’est pratiquement devenu un marché traditionnel pour nous», raconte Bill Sheehan, vice-président de E. Gagnon & Fils et président de l’Association québécoise de l’industrie de la pêche (AQIP).
Cette présence nippone se remarque dans plusieurs autres usines de transformation de l’est du Québec, puisque le Japon est l’un des principaux acheteurs internationaux de produits de la mer québécois, avec les États-Unis et le Danemark. Selon les derniers chiffres disponibles, en 2020, les exportations de produits de la mer québécois vers le Japon étaient évalués à 4,6 millions de dollars.
Des produits de luxe
Si le crabe des neiges représente la plus grande partie des exportations des fruits de la mer québécois (3,6 millions) vers ce pays d’Extrême-Orient, l’invertébré est aussi accompagné de produits parfois encore méconnus ici: bourgots (ou buccins), mactres de Stimpson, oursins ou rave de hareng, ainsi que des poissons de fond, comme le flétan.
Les exportations vers le Japon ont déjà représenté jusqu’à 25% de la production de E. Gagnon & Fils, mais cette proportion se situe maintenant aux alentours de 10%. La COVID-19 et les difficultés de manutention qu’elle a engendrées ont notamment compliqué l’exportation vers le Japon. Il faut dire que les Japonais sont des clients plutôt… exigeants.
Par exemple, les Japonais veulent des crabes à la carapace rouge-orange vif, sans cicatrices ni marques, avec un taux de chair élevé. Chaque section de l’animal est relavée et rebrossée minutieusement avant d’être emballée. À l’usine, des inspecteurs japonais sont présents pour inspecter visuellement chaque boîte et faire des tests de qualité.
La production destinée au Japon demande donc une main-d’œuvre nombreuse et un rythme de production plus lent, mais procure une intéressante «plus-value» aux entreprises exportatrices, selon le président de l’AQIP.
«C’est un marché axé sur la qualité et non sur le volume», résume André-Pierre Rossignol, conseiller à l’exportation pour Gimxport, un organisme qui accompagne les entreprises de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine dans le développement de nouveaux marchés. «Ils ont les moyens de payer pour la qualité et s’attendent à l’avoir.»