Les résultats ont dépassé leurs espérances et, rapidement, les bouteilles de La Seigneurie de Liret sont devenues une denrée prisée des restaurateurs, en particulier Nuage effervescent, qui a été servi lors du sommet du G7 à La Malbaie en 2018, révèle-t-il fièrement. «C’est vraiment comme un champagne, même si on ne peut pas utiliser cette appellation», précise-t-il, puisqu’elle est réservée aux vins effervescents français produits en Champagne. De fait, ce mousseux blanc élaboré à partir des mêmes cépages que ceux qui brillent dans les grandes maisons champenoises — chardonnay, pinot noir et pinot meunier — a même réussi à tromper des sommeliers dans le cadre d’une dégustation à l’aveugle.
Des cépages européens à l’île d’Orléans?
Sans surprise, on leur demande régulièrement comment ils arrivent à cultiver, dans la région de Québec de surcroît, des cépages aussi fragiles que le pinot meunier, que peu de vignerons québécois se sont risqués à planter, même dans les points les plus chauds de la province.
En plus du microclimat qui favorise la culture des petits fruits et de la vigne dans cette partie de l’île d’Orléans, souligne Sébastien Demers, sa famille a recours non pas aux traditionnels géotextiles, mais bien à des couvertures isolantes qui ont l’avantage de garder les vignes à une température constante — quelques degrés en deçà du point de congélation — durant l’hiver. Une première au Québec. «Comme mon père s’intéressait surtout aux vinifera et qu’on était dans le domaine de l’isolation industrielle, on s’est dit qu’on essaierait de protéger nos vignes avec nos couvertures isolantes, qui sont normalement utilisées dans l’industrie pétrolière ou minière, et ça a marché.» La preuve: depuis 2011, les Demers n’ont perdu aucun plant à cause du gel, et ce, sans même recourir à un système de chauffage au glycol.
Et c’est ainsi que le «petit» projet de retraite de Gaétan Demers continue de prendre de l’expansion: aux 10 000 vignes initiales, la famille a récemment ajouté 1500 plants de riesling et envisage de planter davantage d’hybrides pour la production de Mousse des vents, son mousseux rosé.
Sans conteste, l’île d’Orléans porte mieux que jamais le surnom «d’île de Bacchus» que lui avait donné jadis Jacques Cartier, en l’honneur du dieu du vin!