Mais attention, pour en saisir la quintessence, il faudra traiter les fleurs avec délicatesse.
«Elles supportent très mal la chaleur, le goût va complètement changer si on les chauffe, alors je vais les travailler à froid. La façon la plus simple et délicieuse d’y goûter est de défaire les petites fleurs une à une et de grignoter la base, plus tendre que les pétales, où se trouve tout le miellat. Tout le goût est là, un bonbon naturel!»
Cette façon de faire est toutefois fort circonscrite dans le temps. Heureusement, le chef a plusieurs astuces qui permettent de prolonger le plaisir quelques mois.
Crème glacée, anglaise, pâtissière ou fouettée, gelato ou sorbet: Pierre-Olivier Ferry a apprêté le lilas sous 1001 formes! Mais la simplicité a finalement meilleur goût et c’est en limonade au lilas, ou «lilanade» qu’il le préfère.
Coeur de lilas
Quand nous lui avons parlé, la cheffe du Bika ferme et cuisine, Fisun Ercan, venait tout juste d’ouvrir sa nouvelle cantine à Saint-Blaise-sur-Richelieu et s’apprêtait, quelques jours plus tard, à accueillir les clients autour de sa réputée table champêtre. Malgré le tourbillon, elle trouvait le temps de reluquer les lilas avoisinants, pour ne rien manquer de leur éblouissante floraison. «Je compte les jours», confie en riant celle qui adore cuisiner avec les thyrses, nom scientifique des généreuses grappes fleuries. Elle en fait, entre autres, de délicieux sablés et une crème glacée où on distingue très nettement les fleurs qui ne perdent rien de leur éclat. «J’infuse durant au moins une journée les fleurs dans la crème que je vais utiliser pour fabriquer la crème glacée. C’est fin, délicieux et joli!»
Dans le cas des sablés, la cuisson s’effectue à une température relativement peu élevée, ce qui permet de conserver l’intégrité et la couleur des fleurs, pour un coup d’oeil charmant.
Le joli temps du lilas
Pierre-Olivier Ferry se réjouit d’avoir réconcilié plusieurs aînés avec cette fleur longtemps associée aux… enterrements. «On n’enterrait pas l’hiver, on faisait ça au printemps et souvent, il y avait beaucoup de bouquets de lilas lors des cérémonies», rappelle-t-il.
Aujourd’hui, fort heureusement, la fleur est bien davantage un merveilleux auspice de l’été qu’un mémento des deuils amoncelés durant la morte-saison. «Le lilas, c’est l’arôme messager du printemps, un plaisir réconfortant, une beauté ultime à la table, dans la bouche, pour l’odorat», lance Fisun Ercan, comme une déclaration d’amour sentie.