Aux origines de l’Halloween - Caribou

Aux origines de l’Halloween

Publié le

28 octobre 2025

Texte de

Amélie Masson-Labonté

La fête d’Halloween a connu d’importantes transformations symboliques au cours de son histoire. Autrefois nommée All Hollows’ Eve, cette célébration rituelle transitoire, loin de l’événement commercial que l’on connaît, avait une grande importance culturelle. Plongeon au cœur de festivités oubliées.
origines de l'Halloween
Photo de Joshua Hoehne
La fête d’Halloween a connu d’importantes transformations symboliques au cours de son histoire. Autrefois nommée All Hollows’ Eve, cette célébration rituelle transitoire, loin de l’événement commercial que l’on connaît, avait une grande importance culturelle. Plongeon au cœur de festivités oubliées.
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La célébration celte de l’All Hollows’ Eve et ses pratiques alimentaires liées aux récoltes s’implantent au XIXe siècle en Amérique du Nord. Permettant à l’origine aux participants de transcender de manière collective les peurs associées au froid, à la mort et à l’obscurité, elles symbolisent l’apaisement, le réconfort, l’espoir du renouveau, de la félicité amoureuse et de la vie.

Un passage entre les mondes

Une fois le bétail à l’abri pour l’hiver et les derniers champs vidés, les communautés paysannes de l’ancien monde celte se réunissaient la nuit du 31 octobre dans une célébration rituelle entourant la fin des récoltes et le passage vers le nouvel an du 1er novembre. Le folklore irlandais raconte qu’en cette nuit de transition propice aux événements magiques, une brèche s’entrouvre entre les mondes, libérant l’esprit des morts, agitant les campagnes et perturbant les êtres vivants. On y célèbre le surnaturel, entamant la moitié sombre de l’année par des danses macabres autour de feux de joie et de lanternes de rutabagas destinés à repousser les esprits errants.

Les plats typiques de la fête païenne de Samhain, rebaptisée All Hallows’ Eve (veille de la Toussaint) par l’Église catholique au IXe siècle, mettent en valeur les fruits tardifs et les légumes d’hiver tout juste récoltés. On boit du cidre, on mange des pommes cuites, des fruits secs ainsi que des légumes racines, du chou noir et des noix grillés. Ces pratiques alimentaires occupent deux fonctions sociales particulières: apaiser les esprits tapageurs qui agitent les campagnes avec des offrandes alimentaires, et prédire l’avenir grâce à des jeux divinatoires.

Aux portes de l’hiver, les farces, attrapes et pratiques divinatoires jouent un rôle de régulation sociale en renforçant les croyances communes et en offrant une validation émotionnelle ou un exutoire.

Le jeu de la pêche à la pomme dans une bassine, ou apple bobbing en Irlande, est le jeu de révélation amoureuse le plus apprécié. Dans son édition du samedi 3 novembre 1934, le Sherbrooke Daily Record raconte les parties de pêche à la pomme et les marches fantômes organisées par les résidents écossais du village de Scotstown, en Estrie, le soir de l’Halloween.

La nuit tombée, on pratique aussi le kale pulling au jardin, qui consiste à arracher à l’aveugle une feuille de chou pour dévoiler le caractère d’une future épouse ou d’un futur époux: fade, amer ou doux. Finalement, des châtaignes grillées côte à côte dévoilent les compatibilités amoureuses.

Photo: Conrad Poirier, fournie par BAnQ
En 1934, des fêtards se prêtaient à une variante du jeu de la pêche à la pomme qui permet de rester au sec.
origines de l'Halloween

Plats traditionnels de la veillée de l’Halloween

Dans les Cantons-de-l’Est, où les familles d’origine gaélique sont nombreuses, on sert encore le sowens au souper d’Halloween dans les années 1880, un porridge aigre à base de son d’avoine fermenté qui est associé au temps des récoltes en Écosse. En Irlande, on prépare le colcannon, un plat de pommes de terre pilées additionnées de beurre, de kale, d’oignons verts et de chou. Au colcannon et au barmbrack, un gâteau aux épices et aux fruits secs macérés dans l’alcool ou le thé, on ajoute quelques objets prémonitoires: l’anneau annonce un mariage à venir, le pois est signe de pauvreté, une pièce apporte la fortune, et une fève, un long voyage en mer vers les Amériques. Dans le Westmount des années 1920, on prépare des pommes caramel et du maïs soufflé, une addition culinaire bien de chez nous.

Négocier avec le surnaturel

Revêtus de costumes traditionnels reprenant le thème de la nature en déclin, fabriqués à partir de bois mort, de peau de chèvre, de crânes d’animaux, de lichen et de foin, de jeunes gens d’Écosse et d’Irlande prennent l’habitude de personnifier les esprits malicieux. Commettant des actes de vandalisme et défilant bruyamment de porte en porte, ils réclament les offrandes de fruits, de noix, de bières ou de pièces de monnaie destinées aux créatures de la nuit.

Dans la tradition médiévale du souling, plus pacifique, les enfants pauvres défilent de maison en maison, offrant des prières pour l’âme des défunts en échange de soul cakes, de petits gâteaux ronds ornés d’une croix, aux épices et aux raisins.

Photo: Conrad Poirier, fournie par BAnQ
On passait déjà l’Halloween au Québec en 1938.

D’ailleurs, au Québec, les turbulences associées à cette nuit perdurent jusqu’à la fin des années 1970, où les faits divers des journaux font état de kiosques de lait renversés, de boîtes à lettres échangées, de machinerie agricole déplacée, de fenêtres savonnées et d’œufs lancés sur les maisons n’offrant pas de bonbons.

Du plus loin qu’on se souvienne, les plats festifs associés à cette célébration, son agitation et ses travestissements permettaient une transcendance collective du profond mystère de la mort et de la vie.

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