Le marché local de cette palourde canadienne, à la chair rouge et crème et au goût fin et sucré qui rappelle le homard, est en grande métamorphose, raconte Janita Gagnon, directrice du marketing chez Pêcherie Manicouagan. L’entreprise fondée par son père et ses oncles à Portneuf-sur-Mer, sur la Côte-Nord, transforme la quasi-totalité de la mactre de Stimpson pêchée au Québec depuis une vingtaine d’années. «Quand on a commencé à transformer la ressource, on exportait tout, rapporte Janita Gagnon. Les Japonais raffolent du pied de la mactre, la partie la plus délicate, dont ils se servent pour les sushis et les nigiris; on allait donc vers les marchés asiatiques, qui connaissaient le produit. Tandis qu’on exportait son pied, on a commencé à apprêter le reste de sa chair, qu’on appelle le manteau, dans une saumure et dans une chaudrée en conserves destinées au marché québécois.»
Du nouveau sur le marché local
Malgré tout, en 2015, seulement 15% de la production restaient chez nous. Les propriétaires de Pêcherie Manicouagan rêvaient plus grand.
«De fil en aiguille, nos conserves se sont retrouvées à l’année dans plusieurs grosses poissonneries, puis dans de grandes surfaces à travers la province, explique Janita Gagnon. Et depuis cet automne, avec l’ajout d’une sauce aux fruits de mer pour les pâtes, je suis fière de dire que tous les manteaux qui sortent de l’usine sont consommés ici.»
Pour rapatrier un maximum de pieds surgelés sur le marché local, Pêcherie Manicouagan a notamment misé sur les restaurants de sushis. Grâce à cette démarche, même si on en exporte encore, près de la moitié des pieds restent désormais au Québec, se réjouit Janita Gagnon. «Ceux qui achètent Aki Sushi chez Metro ou qui fréquentent des chaînes comme Yuzu Sushi ont probablement déjà goûté, sans le savoir, à la mactre de Stimpson du Québec!»
Un mollusque à découvrir
Trois bateaux fournissent à eux seuls la totalité de ce que transforme Pêcherie Manicouagan, d’avril à décembre. Les mactres se regroupent en «gisements» au large de la Côte-Nord, où elles croissent lentement, sous l’épaisse couche de sédiments qui tapisse le fleuve Saint-Laurent. Lorsqu’elles atteignent leur grosseur minimale de capture de 80 millimètres, vers l’âge de 15 ans, les pêcheurs les récoltent à l’aide de dragues hydrauliques, équipées d’un jet d’eau qui fait lever les prises en les débarrassant des sédiments.
«Au Québec, l’écosystème dans lequel vit la mactre de Stimpson permet une pêche propre et durable», note Sandra Autef, biologiste et chargée de la recherche et développement chez Chasse-Marée, une entreprise rimouskoise qui fournit une partie des stocks de Pêcherie Manicouagan.