On peut aussi se livrer à de lents travellings de chemins forestiers (comme on pêche à la traîne en chaloupe). Avec des jumelles de bon calibre, pour observer et fouiller la forêt proche.
Quand je tombe sur un spécimen, au-delà de la joie initiale, il me faut établir s’il est possible de le récolter. Un sclérote situé à cinquante pieds de haut sur l’arbre demande une stratégie concertée et des talents de grimpeur. On doit souvent passer son tour.
S’il est atteignable à hauteur d’homme, je prélève le chaga à la hache. Une bonne entaille, puis avec l’effet de levier, je détache la masse noire en prenant soin de laisser au moins deux centimètres de mycélium. Pourquoi? Parce que le chaga va repousser dans les prochaines années. Garanti. J’ai récolté sur le même arbre plusieurs fois!
Au retour, après avoir bien disposé et nettoyé mon butin, je fais sécher les fragments pendant une quinzaine de jours sur des cartons, dans une pièce obscure.
Le sclérotium, la partie noire à la surface du chaga, est coriace. On pourrait la comparer à un polymère particulièrement résistant. Je taille les morceaux avec un ciseau à bois et un marteau, dans une boîte de carton rigide. Gare aux éclats!
Je conserve les morceaux dans des pots Mason, à l’abri de la lumière. Une fois entreposée, la récolte peut être consommée pendant deux ans.
On dit que trouver un spécimen d’Inonotus obliquus est une occurrence rare, qui touche statistiquement un bouleau sur plusieurs milliers.
Chose certaine, c’est un thrill chaque fois de le repérer, même s’il est parfois impossible de le prélever sur le champ. Pour cette raison, j’ai plusieurs excroissances déjà localisées qui m’attendent à l’intérieur des terres. Et combien d’hectares à découvrir encore, jamais investigués?
«Patience et longueur de temps», écrivait La Fontaine
J’y retourne au printemps.