— On a appris cet hiver le congédiement d’un agronome qui a dénoncé l’ingérence du privé dans la recherche publique sur les pesticides et les grains. Comment as-tu reçu cette nouvelle?
C’est troublant et choquant de constater que la recherche publique n’est pas indépendante comme elle devrait l’être. Si on veut réellement choisir un pain qui soit «bon» pour nous, mais aussi pour l’environnement dans lequel on vit, c’est impératif de considérer comment les grains ont été cultivés et d’améliorer les pratiques dans le champ. Un vigneron travaille avec ses vignes et sa fermentation, un boulanger doit travailler avec ses paysans et sa fermentation. Chez Du Pain… c’est tout!, on travaille uniquement avec de la farine certifiée biologique de La Seigneurie des Aulnaies, fabriquée à partir de blés cultivés dans la région autour de la boulangerie et achetés directement des fermiers que je connais et visite. Je collabore même avec eux pour implanter des parcelles de blés de pays, c’est-à-dire des variétés ancestrales, bien adaptées à notre territoire et à ses particularités, qui n’ont pas été sélectionnées dans une optique de productivité (affectant au passage leur force boulangère). L’expression «blé ancien» n’est pas légiférée, mais pour moi, elle correspond à des blés qui existaient avant la révolution verte, hauts sur paille, plus résistants et qui présentent des protéines différentes. Non seulement ont-ils une valeur identitaire, mais ils contribuent en outre à préserver la biodiversité. Pour moi, un «bon» pain, c’est une question de grains entiers (ou presque!), mais aussi de levain, d’environnement, d’identité… sans oublier de goût, de texture, de parfum!