Je reviens des champs et les nouvelles ne sont pas bonnes - Caribou

Je reviens des champs et les nouvelles ne sont pas bonnes

Publié le

14 septembre 2023

Texte de

Bernard Lavallée

Photo de

Katya Konioukhova

Bernard Lavallée, nutritionniste et auteur, bien connu sous le pseudonyme Le nutritionniste urbain a visité les jardins de plusieurs semenciers cet été. Il nous rapporte ce qu’il y a constaté et ce que les semenciers lui ont raconté.
champs
Hamidou Maiga d'Hamidou Horticulture sur sa terre en compagnie de Bernard Lavallée.
Bernard Lavallée, nutritionniste et auteur, bien connu sous le pseudonyme Le nutritionniste urbain a visité les jardins de plusieurs semenciers cet été. Il nous rapporte ce qu’il y a constaté et ce que les semenciers lui ont raconté.
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Même si mon métier de nutritionniste ne m’y avait pas prédisposé, cela fait maintenant au moins dix étés que je visite les champs de nombreux producteurs agricoles. Pour suivre des ateliers, dans le cadre de cours, pour écrire des articles ou juste pour le plaisir de l’agrotourisme. Depuis que j’ai développé une gamme de coffrets de semences pour le potager, ce sont les semenciers avec qui je passe le plus de temps.

Dix étés, donc, à prendre le pouls de ces femmes et de ces hommes qui ont choisi le travail de la terre comme métier. Dix étés à entendre parler de la pluie et du beau temps et de leurs effets sur les fruits de leur labeur.

J’ai justement passé les deux dernières semaines d’août à faire le tour de plusieurs semenciers avec mon amie photographe Katya Konioukhova. Comme chaque année, nous devions immortaliser quelques variétés particulières de fruits et de légumes.

Cet été, quelque chose est différent.

Les nouvelles sur le terrain ne sont pas bonnes.

Tous les producteurs m’ont répété la même chose, allant même jusqu’à m’avertir par courriel pour me préparer à ce que j’allais observer chez eux. Je paraphrase: «Les champs sont laids cette année. La saison a été horrible. Les tomates sont pleines de mildiou. Je ne sais pas quelles plantes pourront être photographiées.»

Ne vous méprenez pas. Ce n’est pas la première fois que des agriculteurs me parlent des défis de la saison. Mais sur une trentaine de variétés qu’on devait photographier, nous avons réussi à en capturer environ sept. C’est la première fois que notre récolte est aussi mauvaise.

«On a eu un été très pluvieux et humide. Les semenciers m'ont raconté que certaines cultures ont suffoqué dans des sols inondés, la terre n’ayant plus la capacité d’absorber le surplus.»
Bernard Lavallée

Plusieurs maladies qui adorent l’humidité, comme le mildiou, s’en sont données à cœur joie. Imaginez un champ de tomates où tout semble bien aller, puis, presque du jour au lendemain, elles se couvrent de taches brunes et se transforment en purée immonde sous l’effet du pourrissement.

Et ce qui affecte surtout les semenciers, c’est que le mûrissement a été très retardé. De plusieurs semaines. Or, pour récolter des semences viables, il faut impérativement un fruit mûr.

On se croise maintenant les doigts pour que la canicule anormale de septembre prolonge suffisamment la saison pour sauver une partie de la récolte avant l’automne.

Je sais qu’ils sont ingénieux et qu’ils vont passer au travers. Ils ont mis en place des solutions pour pallier les problèmes de cet été et ils réfléchissent déjà à l’an prochain. Mais pour prospérer à long terme, l’agriculture a besoin d’un climat régulier et prévisible, ce que les changements climatiques commencent à dérégler. Cette saison estivale représente-t-elle un présage des années à venir?

Quand tous les producteurs à qui je parle vivent des défis aussi grands, ça m’inquiète beaucoup. Pour eux. Pour nous. Pour le futur.

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