Finalement, la forêt publique, elle n’est pas si publique que ça. Elle appartient aux entreprises d’exploitation forestière et, nous, on n’a pas notre mot à dire. Le pire, c’est que cette industrie est subventionnée par nos impôts.
— Comment la situation s’est-elle détériorée depuis les dernières décennies?
Avant, les coupes étaient faites sur des plus petites parcelles de territoire et de façon pas mal moins intensive. Dans les deux dernières années, c’est pire que jamais dans le Bas-Saint-Laurent. Quand j’étais petit, il y avait tout le temps plein de petites bêtes dans le bois: des martres, des visons, des pékans… Aujourd’hui, quand je vais en forêt, je n’en vois plus jamais et c’est très rare que je voie des traces. Les animaux n’ont simplement plus d’habitat. J’étais justement à la chasse à l’orignal il y a quelques jours et j’ai été choqué de constater à quel point il fait chaud, comparativement à avant. Les bûchers [ndlr: territoires ayant été soumis à une coupe forestière] sont de vrais déserts: il n’y a pas d’ombre créée par les arbres et la terre est asséchée. C’est très néfaste pour les bêtes. En plus, la machinerie défait tellement le sol que plusieurs de mes spots de champignons ont été ravagés…
Avant, les entreprises forestières étaient principalement actives en hiver — la meilleure période de coupe. La qualité du bois est meilleure durant cette saison, puisqu’il est bien sec comme la sève n’est pas encore montée. Aujourd’hui, les compagnies forestières bûchent 11 mois par année, 24 heures sur 24. Ça doit être fait le plus rapidement possible, le plus efficacement possible.
— As-tu espoir que la situation s’améliore?
Pas vraiment… Au moins, le restaurant et certains projets sur lesquels je travaille, comme le Kamouraska Mycologique, incitent plus de gens à aller en forêt et leur font prendre conscience que ce qui se passe est catastrophique. J’aimerais qu’on soit davantage à se battre pour nos forêts.