Sans surprise, le déjeuner permet de répartir l’apport en énergie et en protéines au cours de la journée. Pris quotidiennement, il aiderait aussi à maintenir la glycémie à la normale, et ainsi à éviter les baisses d’énergie – les fameux coups de barre.
Mais l’un des messages les plus régulièrement véhiculés est que si nous ne déjeunons pas, nous risquons de compenser cette privation plus tard en dévorant tout ce qui nous tombe sous la main. De là le lien entre l’abstention de déjeuner et le risque de souffrir d’obésité.
Cependant, l’évidence scientifique n’appuie pas ce lien. Dans le chapitre sur l’obésité et le déjeuner du Practical Guide to Obesity Medicine de 2017, l’auteur conclut que les personnes qui ne déjeunent pas ne mangent pas plus au cours de la journée, parfois moins même, que celles qui déjeunent.
En ce sens, une récente étude américaine publiée dans le Journal of the American College of Cardiology a associé le fait de sauter le déjeuner et le risque accru (27%!) de décéder d’une maladie cardiovasculaire, par ticulièrement d’un accident vasculaire cérébral. L’étude portait sur 6550 sujets de 40 à 75 ans ayant participé au National Health and Nutrition Examination Survey de 1988 à 1994. Les sujets ont ensuite été suivis pendant 17 à 23 ans. Les chercheurs n’ont toutefois pas considéré les changements d’habitudes alimentaires en cours de route, ceux qui ont arrêté ou commencé à déjeuner par exemple. Ils ont tout de même avancé que le déjeuner procure des effets globalement positifs sur certains facteurs de risque des maladies cardiovasculaires, comme l’hypertension et le taux de cholestérol sanguin.
Mais attention! Ils ont aussi remarqué que les participants qui sautent le déjeuner étaient plus susceptibles d’être d’anciens fumeurs, de grands buveurs d’alcool, sédentaires, et d’avoir une qualité alimentaire médiocre par rapport à ceux qui déjeunent régulièrement. Bien que les auteurs de l’étude aient tenu compte de ces facteurs confondants dans leurs calculs, il est plutôt difficile de les écarter complètement, étant donné les risques, largement documentés, qu’ils posent sur la santé cardiovasculaire.
Que penser du jeûne intermittent?
La popularité du jeûne intermittent chamboule certainement l’idée que le déjeuner est d’une importance capitale. Une des formes de ce régime est de restreindre le nombre d’heures dans la journée prévues pour manger, et ce, sans restriction, un peu comme pendant le ramadan. Cela devrait entraîner une perte de poids et ainsi améliorer les données métaboliques qui annoncent habituellement le développement de maladies cardiovasculaires ou de diabète de type 2. Dans les faits, peu importe d’où vient la perte de poids, cela joue aussi sur ces mêmes données. Une méta-analyse publiée en 2018 dans le JBI Database of Systematic Reviews and Implementation Reports indique en effet que le jeûne intermittent apporte sensiblement les mêmes bienfaits significatifs sur la perte de poids qu’une diète restrictive prise en continu.
Apprendre quand le ventre crie famine
Dans un contexte scolaire, par contre, il est souvent question de l’impact de sauter le déjeuner sur la concentration et l’apprentissage. Mais les auteurs d’une étude de 2018 publiée dans l’International Journal of Environemental Research and Public Health se sont surtout intéressés à la qualité du déjeuner de 527 jeunes Espagnols. Les résultats de l’étude indiquent que prendre un déjeuner de qualité de façon régulière favorise l’apport en nutriments, le maintien du poids, la réduction du stress et la performance cognitive, comparativement aux jeunes qui consomment un déjeuner de faible qualité.