Faire le pari de récolter l’hiver - Caribou

Faire le pari de récolter l’hiver

Publié le

08 janvier 2024

Texte de

Sophie Mediavilla-Rivard

Images de

Picbois Productions

Dans le documentaire Récolter l’hiver, diffusé à Télé-Québec le 10 janvier, la réalisatrice Amélie Dussault met de l’avant le travail de maraîchers qui font de l’agriculture tout au long de l’hiver québécois. Rencontre avec ces artisans de la terre audacieux qui continuent leurs récoltes sous des mètres de neige.
Picbois Productions
Dans le documentaire Récolter l’hiver, diffusé à Télé-Québec le 10 janvier, la réalisatrice Amélie Dussault met de l’avant le travail de maraîchers qui font de l’agriculture tout au long de l’hiver québécois. Rencontre avec ces artisans de la terre audacieux qui continuent leurs récoltes sous des mètres de neige.
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Les images de serres verdoyantes et remplies de légumes frais nous évoquent les saisons chaudes. Le documentaire Récolter l’hiver défait ce stéréotype en montrant que l’agriculture dans le froid en embrassant sa nordicité est tout à fait possible au Québec.

«Notre mission, c’est développer l’agriculture à l’année au Québec et produire des légumes qui conviennent à notre climat. En été: des légumes qui aiment la chaleur. En hiver: des légumes qui aiment le froid», explique Catherine Sylvestre, directrice de la Ferme des Quatre-Temps, située à Hemmingford, en Montérégie.

Et les semences qui s’adaptent à la nordicité sont plus nombreuses qu’on pourrait croire: entre des allées d’épinards, de laitues, de pissenlits, de bok choys, de fines herbes et de céleris, l’hiver surprend en offrant de multiples victuailles.

Dès les premières secondes de Récolter l’hiver, on se laisse gagner par la passion un peu folle des maraîchers de la Ferme des Quatre-Temps, de la Ferme Chapeau Melon et du Jardin des Funambules, qui prouvent que de relever cet audacieux pari n’est pas qu’un rêve. Le documentaire de la réalisatrice Amélie Dussault suit les protagonistes de l’automne au printemps, ainsi que leurs productions qui poussent obstinément dans des serres minimalement (souvent aucunement) chauffées.

«C’est un défi parce qu’il n’y avait pas beaucoup d’information sur le sujet avant. On est de plus en plus nombreux à faire de l’agriculture hivernale, donc on va apprendre et on va s’améliorer», croit Jean-Martin Fortier, l’instigateur du projet de film. Celui qui se fait le porte-voix de l’agriculture d’hiver dans le documentaire est également l’auteur du livre Le Maraîchage nordique: découvrir la culture hivernale des légumes, paru en 2021.

Ouvrir la voie

Récolter l’hiver, ça implique de dire au revoir aux nombreuses heures d’ensoleillement, à la météo clémente et de ne pas craindre d’enfiler ses mitaines et de sortir sa pelle. Ça comprend des prises de risques considérables et ça demande de l’énergie à longueur d’année. Est-ce que c’est stressant? «C’est sûr, mais je dirais plutôt que c’est excitant», lance Catherine Sylvestre. «Au début, on ne savait pas si ça allait fonctionner, et quand on réalise que c’est le cas, c’est vraiment excitant de voir le potentiel de cette nouvelle production-là.»

Le film met de l’avant les essais et erreurs des agriculteurs; bien qu’il y ait parfois des pertes considérables, les réussites les marquent davantage. Chaque année, la Ferme des Quatre-Temps essaie de cultiver de nouveaux légumes durant la saison froide. Selon sa maraîchère, le bilan est positif 95% du temps. «Au moment du tournage, ça faisait déjà six ans qu’on cultivait des légumes en hiver», souligne la directrice. En développant des connaissances, une expertise et de la documentation sur l’agriculture hivernale, les maraîchers espèrent que ce projet bourgeonnant prendra de l’expansion dans les années à venir.

«Ce que je vois pour les prochaines années, c’est que tous les agriculteurs du Québec vont être capables de cultiver des légumes en hiver, et qu’on va pouvoir fournir nos clients à l'année.»
Catherine Sylvestre

Agriculture d’avenir

Pour les protagonistes du documentaire, ce nouveau type d’agriculture doit se construire de la serre à l’assiette. Jean-Martin Fortier souhaite que la demande reflète cette nouvelle offre qui se crée dans la province. «Ça nous permet surtout d’avoir plus de sécurité alimentaire, ça s’inscrit dans une logique de souveraineté alimentaire pour le Québec», souligne-t-il. «Manger, c’est un geste agricole. Les gens l’oublient. Nous, on est là pour leur rappeler.»

Catherine Sylvestre ressent aussi une fierté particulière par rapport au travail des femmes en agriculture, qui est beaucoup mis en lumière dans le film. «Je trouve qu’on n’est pas souvent mises de l’avant, et c’est une raison qui m’a poussé à participer au projet de documentaire. Je voulais montrer qu’on existe, qu’on est là, qu’on contribue et qu’on n’est pas juste la femme du fermier.»

Si toutes les réponses aux défis de l’agriculture d’hiver ne sont pas évoquées dans Récolter l’hiver, on ne peut qu’être inspiré par ces maraîchers qui sont en train de parfaire une recette tirant profit de l’hiver québécois et s’adaptant aux saisons. Les images à la fois simples et grandioses nous reconnectent à nos racines, qui s’ancrent dans le nord et qui s’épanouissent malgré le froid.

Récolter l’hiver sera diffusé sur les ondes de Télé-Québec le 10 janvier à 20h.

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