Publié le
01 octobre 2024
Texte de
Caribou
Photos de
Myriam Baril-Tessier
Le chef des services alimentaires de l’hôpital Notre-Dame connaît le dédale des corridors de l’établissement montréalais par coeur. Entre les murs, il salue tout le personnel qu’il croise. Après 18 ans à y travailler, il a pris ses aises. La mission de Jean-Marc Riverin et son équipe de nutritionnistes et de cuisiniers? Élaborer des menus pour la cafétéria et la patientèle de l’hôpital qui sont aussi adaptés aux 3200 personnes qui obtiennent des soins dans la quinzaine d’établissements du Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal. Ça représente 70 diètes différentes à respecter, entre les centres de soins de longue durée, les hôpitaux et les centres locaux de services communautaires.
En plus de ce casse-tête nutritionnel, Jean-Marc Riverin a depuis ses débuts la volonté de proposer une offre plus locale et plus durable aux gens qu’il nourrit. «Quand je suis arrivé ici, on ne trouvait pas d’aliments québécois sur les menus, et l’aspect clinique occultait beaucoup de choses, comme le goût et la satisfaction des patients», indique-t-il. Quitte à déranger, Jean Marc Riverin n’a pas hésité à remettre en question les façons de faire. «Quand j’ai demandé pourquoi nos courges Butternut surgelées arrivaient d’Europe, je n’ai pas eu de réponses satisfaisantes», poursuit-il. Une question à la fois, il a pu apporter des changements aux menus de l’établissement.
Volonté de consommer davantage de produits locaux
Puis sont arrivées 2020 et la COVID-19. «Les ruptures de stock alimentaire ont eu un effet accélérant sur la volonté de consommer plus local», constate Jean-Marc Riverin, soulignant toutefois que la bonne volonté générale s’est atténuée depuis. «Avant la pandémie, des portes étaient verrouillées. Elles ont été entrouvertes et, maintenant, il faut empêcher qu’elles se referment», dit le Saguenéen d’origine.
Comme une poussée pour l’aider à surfer sur la tendance du local, Équiterre a lancé en 2020 le projet Commun’assiette, qui permet de favoriser l’alimentation durable dans les institutions grâce à l’ajout d’aliments sains, locaux et écoresponsables sur les menus. Pour Jean-Marc Riverin, la plus grande force du projet est d’encourager la concertation entre les membres à travers une communauté de pratique. «Grâce aux rencontres de Commun’assiette, j’ai réalisé l’importance d’échanger et de rompre l’isolement», affirme-t-il. Il a constaté que les garderies, les hôpitaux et les établissements d’enseignement ont les mêmes objectifs et les mêmes questionnements. En se regroupant, il est donc plus facile de trouver des solutions. «Je vois les rencontres de Commun’assiette comme un groupe de partage et d’influence qui permet d’agir sur les gros systèmes.»
La force du nombre pour propulser la filière, de la terre à l’assiette
Jean-Marc Riverin croit à la force du nombre. «En nous mettant ensemble, nous pouvons commander à des producteurs québécois des quantités plus importantes [d’aliments], et ainsi profiter d’un effet de levier», explique celui qui a été formé à l’Institut de tourisme et d’hôtellerie du Québec et qui y enseigne depuis une décennie.
Il donne en exemple sa collaboration avec la coopérative Nutrinor et ses produits laitiers du Saguenay–Lac-Saint-Jean. «Je ne trouvais pas d’offre adéquate pour certains desserts que nous voulions ajouter au menu, explique-t-il. Aux côtés de partenaires rencontrés grâce à Commun’assiette et qui avaient les mêmes besoins, j’avais plus de poids pour approcher Nutrinor. Nous avons cocréé du blanc-manger, du riz au lait et des desserts protéinés qui sont maintenant sur les menus de nombreuses institutions au Québec.»
Ainsi, un changement à la fois, le menu de l’hôpital Notre-Dame revêt un aspect de plus en plus local. «Nous sommes présentement à 59% d’aliments provenant du Québec», affirme Jean-Marc Riverin, qui vise encore plus.
Manger mieux à l’hôpital, pour la santé et pour les papilles
Poulet au beurre avec riz aux pois verts et brocolis, pâté chinois accompagné de ketchup et de betteraves marinées, bouilli canadien et pommes de terre grelots, spaghetti à la sauce aux lentilles… À l’hôpital Notre-Dame, la variété plaît aux patients et patientes.
Après tout, le critère numéro un de Jean-Marc Riverin pour qu’un plat se retrouve sur le menu, c’est qu’il soit apprécié. «Notre boussole, c’est la satisfaction des patients!» lance-t-il.
Le chef des services alimentaires pourrait prendre sa retraite, mais il a le sentiment qu’il a encore des choses à accomplir. Ou sans doute souhaite-t-il être témoin de certains changements avant de partir. Il aimerait voir les dirigeants des institutions faire leurs calculs selon des critères qualitatifs plutôt que quantitatifs. Ou lire sur les menus la provenance des aliments et le nom des fournisseurs, comme au restaurant, précise-t-il. Il croit que pour y arriver, tout le monde doit s’y mettre: «Les usagers ne doivent pas hésiter à demander plus d’aliments locaux aux institutions. Si c’est disponible, pourquoi n’y auriez-vous pas accès?»
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