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Vous trouvez que l’année 2020 n’est pas de tout repos? Parlez-en à Marie-Josée Daguerre, copropriétaire des Jardins de la Pinède, à Oka. La ferme maraîchère bio a dû naviguer entre les écueils de la pandémie et les aléas du climat pour atteindre son objectif: offrir des paniers de légumes locaux, frais et diversifiés toute l’année.
Texte de Benoit Valois-Nadeau Photos de Fabrice Gaëtan
Lorsqu’on la joint par téléphone à l’heure convenue, Marie-Josée Daguerre est en train de gérer les conséquences pour son équipe du passage en zone rouge de la grande région de Montréal. L’heure est grave, mieux vaut la rappeler à un meilleur moment.
Quelques heures plus tard, la situation est maîtrisée… ou presque. «Beaucoup de fournisseurs viennent à la ferme, alors ça demande des ajustements. On a aussi des travailleurs agricoles arrivés la semaine dernière, et on a appris ce matin qu’il y avait des cas de COVID-19 dans l’avion. Ils sont en quarantaine et on attend les résultats de leurs tests. C’est un peu stressant pour toute l’équipe!» explique-t-elle d’un ton énergique.
Ce deuxième confinement est la plus récente tuile à tomber sur la tête de la mère de deux adolescents. Et pourtant, on ne décèle aucune trace de découragement dans sa voix.
La pandémie n’est certes pas le premier défi rencontré par les Jardins de la Pinède, petite exploitation agricole lancée en 2015 par Marie-Josée et Louis Vaillancourt, son conjoint.
Elle était récréologue, lui paramédical. Installés à Montréal et sans grande expérience dans les champs, ils rêvaient tous deux d’une petite ferme familiale respectueuse de l’environnement. Le couple a jeté son dévolu sur un verger abandonné, qu’ils ont transformé à force de bras avec leurs deux enfants, Félix et Maude.
«On est complètement partis de zéro! se rappelle en riant celle qui est retournée sur les bancs d’école pour acquérir une formation horticole. On a procédé par essai et erreur, et c’est encore la formule qu’on préconise aujourd’hui.»
Cinq ans après leurs débuts, les Jardins de la Pinède produisent des tonnes de légumes et emploient jusqu’à 25 personnes pendant l’été. La ferme a également acquis quelques porcs, qui sont intégrés à son plan de rotation des cultures.
La force du groupe
Cette croissance rapide, Marie-Josée Daguerre l’attribue en grande partie au travail acharné de l’équipe qu’elle a rassemblée autour d’elle.
«Le respect, l’effort, la solidarité, l’entraide, c’est ce qu’il y a de plus important et ce qui nous permet d’avancer», dit-elle avec conviction.
«Plus l’équipe grandit, plus on va chercher des forces d’autres travailleurs. On s’ouvre à d’autres idées et à d’autres techniques. Ça nous permet de nous développer. Si on reste centrés uniquement sur ce qu’on connaît, on n’évoluera jamais.»
Marie-Josée Daguerre
Cette équipe tissée serrée lui aura permis de passer à travers une saison 2020 rocambolesque, ponctuée de canicules, de sécheresses et d’un manque temporaire de main-d’œuvre.
Tout cela au moment où la demande pour les paniers de familles a explosé, passant de 300 à 800 livraisons chaque semaine.
«Comme beaucoup de fermes, avec la pandémie et l’intérêt pour l’achat local, on a vu cette année un véritable engouement pour les paniers de famille. Ça nous a permis d’assurer les ventes et la production, mais ça venait avec l’incertitude de savoir si on allait être capables de produire.»
En cette année un peu spéciale, les Jardins ont consacré 70% de leur production aux paniers, qui sont livrés dans des commerces de Montréal, de Rosemère, de Blainville et de Saint-Eustache. Le reste est écoulé dans les restaurants et petites épiceries du secteur. COVID-19 oblige, la ferme a décidé de faire l’impasse sur la vente dans les marchés publics.
L’année 2020 marque aussi le passage à une production annuelle, et non plus seulement saisonnière.
En plus de serres, la ferme est dotée de salles de germination et d’installations pour conserver les légumes tout l’hiver. «Ma motivation, c’est d’offrir, ici au Québec, une alimentation locale 12 mois par année. Je veux réussir à offrir à mon client une assiette complète, saine, diversifiée toute l’année», explique l’agricultrice.
Si ce nouvel objectif requiert beaucoup de planification, Marie-Josée Daguerre prend tout de même le temps de travailler aux champs, là où se trouve l’essence même de son métier.
«Quand on met les mains dans la terre, on ne pense plus et on profite du moment. Moi, répondre à des courriels, ça m’embête vraiment. Je veux être avec mon équipe, connaître sa réalité et avoir du plaisir. Les journées dont on se souvient le plus, les plus belles, ce sont toujours les plus difficiles. Pourquoi? Parce qu’on a réussi à dédramatiser, à rire et à créer des souvenirs avec ces moments-là. Les journées où il faisait 1000 °C, où on a ri comme des fous parce qu’il faisait trop chaud pour travailler, on va s’en souvenir pour toujours!»
Rafraîchissante babiole
Les paniers d’automne des Jardins de la Pinède sont bien garnis: choux, brocolis, poireaux, carottes, patates douces, oignons, betteraves, courges… Marie-Josée Daguerre a un faible pour la rabiole, un légume racine à chair blanche. «Pour moi, ça goûte le ciel! dit-elle. C’est un peu croquant, sucré, juteux, un peu piquant, mais très légèrement.» Excellent cru, en salade ou poêlé, ce légume trouve également sa place dans les soupes ou les ragoûts.
Saviez-vous que Marie-Josée Daguerre et Louis Vaillancourt font partie des producteurs qui livrent leurs fruits et légumes bios directement chez Rachelle Béry? Pour en apprendre davantage à ce sujet, c'est ici.
Chaque semaine, Caribou fait découvrir dans les pages du quotidien Le Devoir, un homme ou une femme, qui, à sa façon, nourrit le Québec.