Stratégie de marketing donc, que les connaisseurs retournent à leur avantage. Ainsi, Katheryne Aubert, sachant que les nettoyants finissent toujours par être soldés, n’utilisera jamais un rabais de 2$ pour un savon de 5,98$. Elle attendra qu’il tombe en spécial à 1,98$, et, avec son coupon, l’aura alors tout à fait gratuitement. Ses bonnes affaires lui permettent de faire des dons de nourriture lorsque des collectes sont organisées dans sa région, un geste généreux qui, selon elle, est courant parmi les adeptes de couponing: «Quand des familles font une demande d’aide sur Facebook, c’est souvent les “couponeuses” qui sont les premières à répondre à l’appel.»
La conjoncture économique influence la pratique du couponing, même si la communauté de ceux qui s’y adonnent est hétérogène (toutes les générations y sont représentées) et que même des personnes bien nanties en font. Aux États-Unis, la crise de 2008 a donné un coup de fouet à l’utilisation de coupons, rappelle Deny Bélisle. Difficile toutefois d’estimer le nombre d’adeptes au Québec. Miss Coupon peut seulement dire qu’elle est passée de 700 à 1 500 clients (dont seulement une trentaine d’hommes) en 2020, année pandémique qui a affecté le pouvoir d’achat de la population.
Ce sont surtout les produits non périssables qui ont la faveur des «couponeuses», parce qu’on peut en acheter une grande quantité d’un coup lorsque les astres des rabais s’alignent. Typiquement, il s’agit de boîtes de conserve, de céréales, de biscuits… Les produits ménagers et le papier de toilette font aussi partie des classiques.
Difficile par contre de trouver des produits locaux: ce sont surtout les Kraft et les Unilever de ce monde qui investissent ce créneau. «Il y a une infrastructure à mettre en place pour l’émission de coupons et la bonne gestion du processus avec les détaillants. C’est pourquoi ça concerne davantage les très gros joueurs», précise Deny Bélisle.
«De la scrap», mais aussi des amitiés
C’est d’ailleurs pourquoi Lili Marchand, une des pionnières du couponing au Québec, a décroché. Administratrice du site spécialisé OnMagasine depuis 2011, ancienne chroniqueuse au Journal de Montréal, elle ne mâche pas ses mots: les produits qu’on achète grâce aux coupons, «c’est de la scrap!» Des aliments transformés, trop sucrés ou trop salés, pas bons pour la santé…
Elle ne regrette toutefois pas les années qu’elle y a consacrées: elle s’est créé une communauté tissée serré, qui interagissait sur son site web, puis au sein de son groupe Facebook.