Martyre du 4e siècle, sainte Catherine d’Alexandrie était érudite et forte tête; l’empereur romain Maxence la fit exécuter quand elle refusa de l’épouser. Le patronage généreux de cette sainte adulée dans plusieurs Églises chrétiennes s’étend notamment aux barbiers, aux couturières, aux écoliers, aux notaires et, fameusement, aux filles à marier.
L’association du bonbon à la sainte figure reste nébuleuse. Selon certains témoignages, sœur Bourgeoys aurait ouvert les portes de son école le 25 novembre 1658, jour de la Sainte-Catherine, mais les historiens réfutent généralement cette hypothèse. Autre piste: puisqu’elle accueillait les Filles du roi dans son école, la fondatrice aurait naturellement souhaité honorer la patronne des jeunes femmes en quête d’un mari. Quoi qu’il en soit, jusqu’à la laïcisation des établissements scolaires, dans les années 1960, on rendait hommage à la sainte chaque année par des fêtes, des pièces de théâtre et des défilés — et la consommation de tire en abondance.
Mais l’image qui colle le plus durablement à la tire Sainte-Catherine, et à la sainte qu’elle célèbre, c’est certainement celle des filles à marier, qu’on appelait autrefois «vieilles filles» si elles atteignaient les 25 ans sans bague au doigt. Le 25 novembre, elles portaient traditionnellement des chapeaux de circonstance pour signaler leur disponibilité, et l’on organisait des veillées de musique et de chanson pour favoriser la rencontre avec un futur prétendant. Le petit délice sucré était alors savouré par tous les membres de la communauté, et la fête de la sainte était l’occasion de confectionner en famille les bonbons de tire.
Car la recette se prête bien au travail d’équipe. Après avoir mélangé et fait chauffer les ingrédients, on laisse refroidir légèrement le pâton avant de l’étirer en long cordon et de l’entortiller à plusieurs reprises — une opération plus facile à réaliser à deux, et traditionnellement déléguée aux jeunes de la maisonnée. Peu à peu, la mixture prend une belle couleur blonde et brillante. On peut alors la couper en morceaux et l’emballer en papillotes de papier ciré. C’est d’ailleurs son allure de pépite brillante qui aurait valu à la tire son autre nom, la «clennedaque», en référence aux magots d’or du Klondike, dont le mot est dérivé, précise Jean-Marie Francœur. Un trésor bien de chez nous à redécouvrir.