Publié le
07 juillet 2022
Texte de
Geneviève Daoust
Photos de
Geneviève Daoust
La définition officielle du glanage, selon l’Office québécois de la langue française, est celle-ci: «Action de ramasser après la moisson, dans les champs ouverts appartenant à autrui, les épis restant sur le sol. Action de recueillir les épis qui ont échappé aux moissonneurs.» Vous l’aurez deviné, concrètement, il s’agit de bien plus.
Dans cette optique, le glanage est une pratique visant à ramasser les fruits et légumes qui n’ont pas été cueillis par son ou sa propriétaire, au sol ou dans les arbres. Cette initiative permet d’éviter le gaspillage alimentaire, de valoriser et d’utiliser les produits frais et locaux, ainsi que de promouvoir le partage et la solidarité. Généralement, la règle suivante s’applique: le tiers de la récolte est distribué entre les cueilleuses et cueilleurs, le tiers est remis à la ou au propriétaire et le tiers est destiné à un organisme solidaire.
J’ai découvert cette pratique surtout durant la pandémie. Je prenais de longues marches dans mon arrondissement montréalais, Rivière-des-Prairies–Pointe-aux-Trembles. Au fil de mes sorties, j’ai noté des arbres fruitiers en fleurs au printemps, pour ensuite les voir se transformer en arbres remplis de fruits. Ma réflexion a été la suivante: qu’en était-il des surplus de cette abondance?
J’ai écrit des lettres aux propriétaires. J’ai expliqué ma démarche, celle où j’avais à cœur les fruits et légumes locaux et où je souhaitais contribuer à éviter le gaspillage alimentaire. Quelques personnes m’ont répondu. Ça a été le début d’une expérience, d’un partage d’une grande richesse entre inconnus.
J’ai marché aussi dans les parcs de mon quartier. Se promener à différents moments de l’année permet de repérer des arbres et arbustes fruitiers dès leur floraison. C’est de cette façon que j’ai trouvé des amélanchiers, qui font de petits fruits foncés délicieux à la fin du mois de juin. Des arbres aux petits fruits orange avaient aussi attiré mon attention; j’ai découvert l’argousier. Comme ils étaient sur un terrain public, la cueillette en était facilitée.
J’ai aussi rencontré virtuellement des gens qui avaient ce même intérêt. Des gens qui font partie de groupes de glanage officiels et structurés. Il y en a dans plusieurs régions. C’est motivant et mobilisant, surtout si vous cherchez une activité bénévole. À Montréal, notons Les Fruits défendus. Pour voir ce qui se fait dans votre coin, consulter cette liste.
Du côté plus rural, le glanage se fait aussi dans les champs, lorsque les agricultrices et agriculteurs ont terminé leurs récoltes. Ayant déjà moi-même un espace potager, je n’ai pas encore testé l’expérience puisque mes besoins en légumes sont assez bien comblés, mais je vous le recommande.
Voici quelques conseils que je vous partage de mes observations et expériences:
Soyez en groupe!
Rappelons que le glanage se veut une activité de partage et de solidarité pour éviter le gaspillage alimentaire. Partager, c’est encore plus facile en groupe!
Être plusieurs, c’est sécurisant, mais surtout, sécuritaire. La sécurité de tous et toutes est essentielle. Dès qu’il y a une échelle et des fruits en hauteur impliqués, le glanage ne devrait pas se faire en solitaire.
Avec des amis ou de la famille, ça devient une activité de plaisir, un moment de rassemblement.
Ayez les bons outils de cueillette et de transformation
Il est primordial de préserver la nature; l’environnement de cueillette devrait être aussi propre, sinon plus, qu’à son arrivée. Il s’agit aussi d’éviter de blesser l’arbre. De bons outils sont nécessaires: perches, échelles, escabeaux, sécateurs, couvertures en tissu pour attraper les fruits qui tombent, etc. Avoir les bons outils contribue aussi à sa propre sécurité, notamment en hauteur. Je recommande d'avoir des lunettes.
Si vous cueillez de grandes quantités, vous verrez que la transformation deviendra une étape importante. Prévoyez les bons outils en conséquence: éplucheur, vide-pomme, dénoyauteur, déshydrateur, etc.
Acceptez les fruits imparfaits
Le culte des fruits et légumes parfaits appartient aux grandes surfaces, où la taille, la couleur et la forme sont contrôlées. Vous verrez, dès votre première poire, prune, cerise ou pomme locale cueillie dans un parc ou chez votre voisinage, cette vision pourrait ne plus faire de sens. Rien n’est meilleur qu’un fruit frais, savoureux, biologique, cueilli et donné avec amour et bienveillance. Ses quelques imperfections esthétiques deviendront superflues.
Les fruits tombés au sol peuvent parfois avoir quelques petites blessures à la suite de leur chute, mais sinon, vous serez surpris(e) de leur qualité incroyable.
Redistribuez, partagez et échangez
Tous n’ont pas la chance d’avoir accès à des fruits et légumes frais. Que ce soit avec des groupes structurés de glanage qui font déjà affaire avec des organismes solidaires locaux ou par vous-même, n’hésitez pas à partager vos surplus de récoltes, que vous soyez propriétaire, cueilleuse ou cueilleur. Des organismes de votre quartier se réjouiront de ces dons.
Si une personne vous donne accès à ses surplus, pourquoi ne pas lui redonner en partageant une recette issue de vos récoltes, un bouquet de fleurs ou toute autre création de votre part en guise d’échange?
Aussi, assurez-vous de cueillir selon vos besoins et d’en laisser pour les oiseaux, particulièrement lorsque l’on parle d’amélanches, des petits fruits qu’ils raffolent.
Ce n’est que depuis peu que j’ai découvert le glanage. Cette activité a redéfini ma vision du quartier, de la communauté et des espaces verts. Toutes les initiatives sont bonnes; si vous êtes curieuse ou curieux d’essayer le glanage sous différentes formes, foncez! Osez aller à la rencontre de votre voisinage, de votre quartier, de vos agricultrices et agriculteurs et d’y faire des découvertes de petits fruits, de fruits et de légumes!