Des légumes qui goûtent le printemps
Publié le
13 avril 2024
Texte de
Virginie Landry
Photos de
Microferme des Petits Pouceux
«Les légumes dits primeurs sont ceux qui arrivent avant la saison principale, explique Lauriane Bordes, copropriétaire de la Microferme des Petits Pouceux, à Sainte-Hénédine, tout près de Québec. Je le vois comme une courbe de Gauss: les primeurs sont au pied de la courbe, avant qu’elle n’explose en été et redescende en automne.»
Ces légumes ont un cycle de production court, c’est-à-dire qu’il n’y a que de 25 à 35 jours entre la plantation et la récolte. Ils sont aussi résistants aux températures encore fraîches des mois d’avril et de mai. «On va les cultiver à l’extérieur sous couverture flottante, en plein champ ou en serre, ajoute la maraîchère. La récolte des primeurs dure deux ou trois semaines, mais on y pense et on la planifie depuis décembre.»
L’attrait de la nouveauté
Dans les plus réputées cuisines de la province, les chefs dont les mets sont basés sur les nouveaux arrivages saisonniers attendent ces premières livraisons avec impatience. C’est le cas de Noé Lainesse, chef au restaurant O’Thym à Montréal, dont le menu «à 99% local» se compose d’une variété de petits plats à partager.
«Mes légumes primeurs favoris sont certainement les premiers radis, les asperges et les têtes de violon. Les premières carottes sont également fabuleuses. Les premiers petits pois sont aussi toujours un événement au restaurant. Tous ces légumes m’excitent!» explique-t-il, visiblement animé par la possibilité de renouveler sa carte avec des produits frais.
Ce qui distingue les légumes primeurs, outre leur précocité, c’est leur saveur raffinée. «Les premiers de la saison sont hyper sucrés», précise le chef, citant en exemple les épinards, les carottes et les radis. «Plus il fait chaud, plus ils développent un goût piquant», poursuit-il.
Afin de laisser ses clients se délecter de toutes les subtilités des légumes fraîchement cueillis, le chef va bien souvent les proposer en assiette de crudités, tout simplement. Un engouement dans la salle à manger qui est tout aussi présent qu’en cuisine.
Même constat du côté de Lauriane Bordes, qui offre aux «plus impatients» de ses abonnés à ses paniers d’été de devancer leur saison de deux semaines avec des primeurs.
Ses clients pourront alors se mettre sous la dent des légumes cultivés en serre (tomates, aubergines, concombres, céleri-branche, haricots) et en champ (bok choys, radis, rabioles, oignons verts, carottes avec feuilles et kale).
«On ne plante pas plus tôt pour avoir des primeurs, note-t-elle, ce sont juste nos premiers légumes!»
Printemps précoce
Les changements climatiques forcent évidemment les agriculteurs à remettre leur calendrier de plantation en question. «C’est notre huitième année comme maraîchers, et c’est la première fois qu’on n’a pas de neige en mars», fait remarquer Mme Bordes. Lors des années précédentes, elle estimait pouvoir accéder à son champ à la fin avril. Elle croit toutefois qu’en 2024, ce sera possible dès le 1er du mois.
«Oui, le printemps est plus précoce, mais on ne prendrait pas le risque de devancer notre implantation au champ pour ça», dit-elle. Du moins, pas encore. Parce que, malgré tout, la planification de leur saison de jardinage ne se fait pas en fonction du couvert de neige, mais elle se base plutôt sur le dernier gel au sol qui, lui, survient toujours à la fin mai.
C’est d’ailleurs à ce moment que les primeurs se terminent et que les producteurs plantent tous leurs légumes, annonçant ainsi l’abondance d’été.