Sœur Angèle: qui va lentement, va bien et va longtemps - Caribou

Sœur Angèle: qui va lentement, va bien et va longtemps

Publié le

03 novembre 2022

Texte de

Virginie Landry

Photos de

Maude Chauvin

«J’étais en train de faire du confit d’oignons!» lance Angiola Rizzardo, mieux connue sous le nom de sœur Angèle, en arrivant à la hâte dans une petite pièce adjacente à la chapelle de l’Institut des Sœurs du Bon-Conseil de Montréal, où elle habite et reçoit ses visiteurs. Souriante, chaleureuse, énergique: rien ne laisse croire que la femme de presque 85 ans est debout depuis 4h du matin à cuisiner, donner des entrevues et prévoir ses prochaines apparitions télé.
Soeur Angèle
«J’étais en train de faire du confit d’oignons!» lance Angiola Rizzardo, mieux connue sous le nom de sœur Angèle, en arrivant à la hâte dans une petite pièce adjacente à la chapelle de l’Institut des Sœurs du Bon-Conseil de Montréal, où elle habite et reçoit ses visiteurs. Souriante, chaleureuse, énergique: rien ne laisse croire que la femme de presque 85 ans est debout depuis 4h du matin à cuisiner, donner des entrevues et prévoir ses prochaines apparitions télé.
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«Je gère mon horaire toute seule, je prends tous mes appels moi-même et je réponds à tout le monde. Et je n’ai même pas de téléphone intelligent!», déclare celle qui est plus occupée qu’un ministre. «Je chantais avec ma chorale hier, demain je vais sur un plateau télé. La semaine prochaine je participe à un festival dans Charlevoix. En chemin, je m’arrête au Centre-du-Québec pour une émission de radio. Et aussi…»

Soeur Angèle est très occupée, et ce, depuis longtemps: cela fait maintenant 67 ans qu’elle est débarquée au Québec de son Italie natale, alors qu’elle n’avait que 17 ans, et quasi autant de temps qu’elle est dans nos écrans. Qui n’a jamais vu l’une ou l’autre de ses chroniques culinaires à l’émission Allô Boubou de Radio-Canada ou possédé un de ses livres de cuisine?

«Je n’arrête pas, c’est 7 jours sur 7. Je n’ai donc pas le temps d’être fatiguée!»

En mission pour sa fondation

Sa fondation éponyme occupe une grande partie de son temps et, visiblement, c’est aussi ce qui l’emballe le plus. Sœur Angèle se démène dans le but d’aider les jeunes à apprendre la cuisine, leur donner le goût de bien manger et faire découvrir les aliments du Québec.

cuisiner

Elle sillonne le Québec en entier à longueur d’année afin de donner des conférences et des ateliers, poser pour des photos avec jeunes et moins jeunes et donner des conseils culinaires sur le pouce à tous ceux qui lui en demandent. Comme si ce n’était pas assez, elle cuisine sans cesse afin de ne jamais arriver à un évènement les mains vides. En effet, des maraîchers passent régulièrement chez elle afin de lui fournir des fruits et des légumes qu’elle pourra cuisiner à sa guise. Elle en profite alors pour concocter des petits plats qui seront occasionnellement vendus au profit de la Fondation Sœur Angèle, comme des sauces et du ketchup maison, son fameux sucre à la crème au micro-ondes ou les petits pots d’oignons confits qu’elle prépare justement ce jour-là.

Apprendre à cuisiner

À son arrivée au Québec, sœur Angèle suit des cours du soir à l’Institut de tourisme et d’hôtellerie du Québec (ITHQ) afin d’y apprendre la cuisine. Elle y enseignera ensuite de 1975 à 1991. Apprendre aux gens à cuisiner est selon elle le plus beau métier du monde. «J’ai la santé des gens entre les mains.»

À son avis, plusieurs ne savent plus cuisiner ou ne prennent plus le temps de cuisiner. Ceux à qui elle a autrefois enseigné «sont maintenant dans les résidences pour personnes âgées où ils ne se préparent plus de repas», déclare-t-elle.

Lorsqu’elle a commencé à enseigner la cuisine au public québécois, elle se souvient qu’il n’y avait que très peu d’ingrédients disponibles: «les gens utilisaient la citrouille, le maïs, la courge, les pommes de terre, les oignons et les carottes. Maintenant, on a accès à tellement d’aliments!» À son grand désarroi, les Québécois ne profitent tout simplement pas de cette abondance.

Pourtant, s’ils revenaient aux bases, elle est persuadée que leur épicerie coûterait moins cher, qu’ils mangeraient mieux et… qu’ils digèreraient mieux!

«On ne mange plus à table, on mange vite, en quelques bouchées, assis devant nos ordis, nos téléphones: on mange devant des problèmes et ça nous fait faire du reflux!»

«Chi va piano va sano e va lontano», lâche-t-elle, dans sa langue maternelle. Qui va lentement, va bien et va longtemps.

«Le temps va vite, mais la vitesse tue. Il faut réapprendre à s’arrêter, à prendre le temps de cuisiner.»
Soeur Angèle

De son côté, sœur Angèle se cuisine encore de bons petits plats quotidiennement. Par exemple, ce midi-là, elle a préparé des gnocchis au fromage accompagnés d’un concombre et d’une pomme. Le soir, elle prévoit se faire une soupe aux légumes, une petite rôtie et un yogourt. Simple, simple, simple, mais nutritif et fait maison.

Hommages

Sœur Angèle récolte aujourd’hui le fruit de son dévouement pour le public québécois. En effet, elle reçoit constamment de nombreux hommages lors d’émissions de télévision ou des plaques commémoratives honorant son travail puis, des salles et studios sont nommés en son honneur.

«On me dit que je suis une icône de la cuisine au Québec. Mais pour être une icône, faut être mort! Je ne suis pas une icône!» déclare-t-elle en riant.

Cuisine

«J’ai toujours été au service de la société, reconnaît-elle plus sérieusement. Et puis, je le vois bien que les gens sont heureux de me voir, les jeunes comme les vieux. Ils ont énormément de respect pour moi, et je le sens. J’appartiens au public québécois.»

«Je suis née deux fois: une fois en Italie et une fois au Québec. Je serai toute ma vie une immigrante, même si les Québécois m’ont adoptée très vite.»

Elle conclut en répétant ce qu’elle dit à tout le monde qui lui demande si elle prévoit un jour ralentir la cadence: «Je serai toujours disponible pour le besoin du moment. Je suis une femme ordinaire qui essaie de donner de l’amour aux gens ainsi que de la confiance. Tant et aussi longtemps qu’ils en ont besoin.»

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